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mardi 4 octobre 2016

La 23eme lettre de l'Alphabet hébreu. Moïse et la Solution finale. Par Dominique Aubier. Suite 3.

Un ouvrage exceptionnel de Dominique Aubier. 

Compte rendu de lecture par Dominique Blumenstihl-Roth


Cet article a été présenté en 3 parties.
Le Qorban ; Tzim Tzoum ; Louriah ; le secret de la 23ème lettre.
Le secret des Téphillin ; La Tour de Babel ; Le secret de Jacob.

3ème partie

6. Le sens de la généalogie biblique
Dans ce livre, Dominique Aubier étudie la descendance de Sem, le fils aîné de Noé. Elle dissèque les équations Sem – Arphaxad, Shelakh, Peleg, Cheroug, Therakh, le père d’Abraham. Tous ces noms de patriarches forment un discours, une harangue que la Vie prononce à sa propre attention, avec une décision, une fermeté dont Abraham sera l’héritier. Ils témoignent d’un fait : l’énergie constructive du cycle inauguré en Babel a circulé dans un canal de transmission dont ces personnages sont les balises. 
Nous suivons dans ce livre la généalogie biblique à la loupe. Il nous raccorde à la longue mémoire de l’humanité dont la Bible retrace le parcours. Abraham et son épouse, qui de leur vie écrivent une page essentielle de l’histoire humaine, intimement liée à celle du langage, au point que leur fils Isaac, selon la Tradition, représente la faculté de parler. Viennent les jumeaux Jacob et Esaü (cette gémellité combative correspond-elle au stade du deuxième jour de la fécondation, quand l’ovocyte se complexifie en deux cellules et deux globules polaires diamétralement opposés ?). La dispute sur le droit d’aînesse trouve ici une explication appuyée sur une expertise nominaliste de premier plan.

L’imperturbable réalisme du Sacré nous invite à compter le nombre de garçons qui naissent de Jacob. Treize enfants, douze garçons, une fille. Or la science observe qu’il existe douze paires de nerfs crâniens, en plus de la moelle épinière. Nouveau Qorban ! Nouveau rapprochement Connaissance et Sciences : Ce sont les treize enfants issus de Jacob. Que disent les noms des douze fils de Jacob ? Ruben, Siméon, Lévi, Judas, fils de Léa ? Dan et Nephtali, fils de Bilha ? Gad et Acher fils de Zilpa ? Issachar et Zabulon issus, eux aussi, de Léa ? Joseph et Benjamin fils de Rachel ? Sous les mots agissent les archétypes. Leurs critères sont fournis par les lettres. Supports éloquents, dit Dominique Aubier. De chaque nom, elle donne le sens. Une incitation au travers des appellations accordées à la progéniture masculine de Jacob. L’auteur situe chacun des fils de Jacob sur une fonction nerveuse qui, dans l’organisme humain, transite par les nerfs crâniens.

Dominique Aubier écarte l’analogisme primaire qui mettrait, d’une manière absurde, tout en rapport avec tout et n’importe quoi. Ainsi, elle va au-devant de l’objection que ne manqueront pas de lui opposer, d’une part les anatomistes qui ne voient rien en dehors de leur spécialité, d’autre part les littéralistes obtus qui s’en tiennent au premier niveau de lecture du texte biblique : pour juger de la réalité de l’analogie ou de son invraisemblance, il faut confronter la description de l’encéphale qu’offrent les sciences cognitives aux faits qui, dans l’histoire biblique, feraient le portrait imagé des mêmes phénomènes.

Je l’avoue sincèrement, les descriptions scientifiques qu’apportent les ouvrages auxquels la kabbaliste renvoie sont ardues. Aussi j’approuve l’auteur quand elle dit, avec son bel humour, qu’il est plus facile de suivre l’ordre des naissances quand elles se produisent dans la famille de Jacob que détecter l’origine embryologique des nerfs crâniens ! Mais le contrepoint scientifique est indispensable à la démonstration. Les points d’analogie significatifs qu’elle relève ont force de preuve.
Dirais-je que la méthode d’investigation qu’elle met en œuvre (le Qorban) est canonisée ? Faut-il préciser que le Qorban est préconisé par la Tradition, mis en acte symboliquement lors du Shabbat lorsqu’homme et femme se rencontrent ? Je l’ai dit : l’auteur percute l’un contre l’autre deux domaines de réflexion, Connaissance et sciences. Le premier brandon a pris feu. L’irradiation est prometteuse.

7. Moïse, les téphillin, le rachat du premier-né

Qui dit révélation des lettres hébraïques interpelle Moïse ! Si le moteur du judaïsme c’est l’universalité, alors le prophète, fondateur de la ritualisation est de la partie. Qu’a fait Moïse quand il met au point la pose des téphillin, le rachat du premier-né et la célébration annuelle de la sortie d’Egypte ? Quel est le sens de ces trois rituels ? 
Rien moins que sauver l’humanité, répondent les religieux. Nous sommes bien d’accord. Mais comment une série d’actes symboliques peuvent-ils agir sur la réalité du monde ? Dominique Aubier explique les effets, sur le système nerveux, sur le corps de l’individu, et sur le corps social, de la pose des téphillin. Ces rituels ont été calculés en raison de leur effet sur le système nerveux et sur la pensée. Moïse, le prophète bègue, les a conçus en fonction de leur emprise sur la chair. C’est en lui-même qu’il a vu l’ordre structurel dont le Tétragramme donne la formule.

Quant au rituel des premiers-nés : s’est-on aperçu que si l’Egypte est le pays des premiers-nés, sa langue serait-elle aussi de ce ressort ? Si l’hébreu est la langue du sens, son premier-né serait aussi une langue : celle précisément qui anime un « En-face » du royaume où règne l’alphabet. Quel est cet En-Face de l’hébreu où naît, en premier, une insurrection opposée à la direction d’essence divine ? Cherchez l’idiome et vous aurez le peuple, le pays et le drame ! Ce premier - né, pourtant, il faut le racheter à tout prix, telle fut la consigne de Moïse. Faut-il racheter le crime du bourreau ? Le judaïsme a-t-il médité tous les enseignements de cette ordonnance ?

Restons modestes devant l’immensité des souffrances. Mais soyons capables de surmonter le pathétisme, d’autant que nous ignorons, depuis des siècles, ce que Moïse a compris et prévu. Aussi ce livre est-il salutaire en ce qu’il dégage ce que l’on croyait obscur, en ce qu’il libère ce que l’on pensait inaccessible : bien des éclaircissements, qui passionneront les égyptologues, mais également tout juif intéressé par sa propre tradition, nous renseignent sur la relation profonde unissant Israël et l’Egypte. L’auteur révèle la personnalité, le courage de Moïse. Elle étudie, au moyen des lettres hébraïques, le passage biblique où Moïse décrit son handicap verbal : le bégaiement. Sémiologie d’une souffrance. Le tableau clinique de la lésion mérite d’être pris en considération par les orthophonistes, car ce qui est en cause, c’est le circuit d’un nerf crânien, le grand hypoglosse. Le diagnostic que porte l’auteur sur cette difficulté langagière (la même qui frappe tant de jeunes enfants) complétera la compréhension des professionnels du langage qui, malgré la mise au point de nombreuses méthodes correctives pratiques, restent fort démunis devant le phénomène.

8. Moïse et la solution finale

Pourquoi Moïse brise-t-il les Tables de la Loi ? Un mouvement d’humeur ? Non, dit le Zohar. Leur destruction est ressentie comme une souffrance équivalente à la mauvaise sortie de Gan Eden ! La véritable raison, c’est le retrait de la lettre Vav. Toujours et encore, les lettres hébraïques et leur sens !

Étonnant Moïse qui, au travers de son expérience de la sortie d’Egypte, a regardé loin dans les temps à venir, par le périscope de sa Connaissance. Il a vu qu’une seconde instance se produirait un jour, dans l’Histoire qui soumettrait son peuple à un joug plus redoutable encore que celui de Pharaon… 

Le prophète a-t-il su voir dans le temps se dessiner la « solution finale » qui viserait à supprimer le peuple juif ? A-t-il sû que l’épisode de l'esclavage en Egypte se renouvellerait, dans le futur et dans un autre pays ? La personne du Führer correspondrait-elle alors analogiquement à Pharaon qui fut acteur en son temps d'une première instance appelant une seconde instance conformément à la loi du Redoublement ? La « solution finale » des Nazis serait-elle la réplique, au sens de répétition aggravée, de la politique d’esclavagisme meurtrier qui sévissait sur les hébreux en Egypte ? Et la formation de l’Etat d’Israël en 1948 serait-elle la réitération de l'arrivée des Juifs en Terre sainte,  après la sortie d’Egypte et la Traversée du désert ? Une question se pose : analogie pour analogie, il resterait, pour l'Israël d'aujourd'hui, à vivre la réédition du don de la loi au Sinaï ! L'émergence d'un nouveau Moïse et d'un nouvel Aaron… L'arrivée d'une vaste explication du phénomène Israël. Et si ce livre réalisait justement cette performance souhaitée ?
 
Car voici enfin une lecture lucide de la Shoah ! Pourquoi l’holocauste ? Pourquoi le nazisme ? Qui est Hitler ? La pensée rationnelle n’a pas expliqué cette calamité. Il faut en effet éprouver ce personnage dans son essence, si l’on veut comprendre comment la figure d’Hitler a pu s’installer dans l’aura charismatique la plus puissante, dans le cadre lyrique de l’héroïsme national germanique et y faire figure d’icône. L’auteur analyse les noms au filtre de l’hébreu : le sens se trouve dans la symbolique des lettres. C’est donc lettre à lettre, grâce aux glyphes hébraïques qu’elle mène l’enquête sur l’identité du Führer. Quelle est sa neshama ? Hitler, reflet karmique de Pharaon ? Dominique Aubier procède à une enquête kabbalistique des éléments biographiques du dictateur, elle étudie sa numérologie, dévoile l’essence de son satanisme.

Lumineuse lecture de l’antisémitisme ! L’objectif nazi est de tuer jusqu’au dernier B’nei Israël de manière à ce que leur génie ne soit plus l’effet du souffle hébreu afin d’en prendre la place. Le défi s’adresse au principe de Création. Sans minimiser la souffrance d’autres peuples ayant subi des génocides, la spécificité du génocide juif réside dans ce principe. Ce qui justifie l’attitude juive dans sa revendication d’un génocide d’exception, c’est le fait qu’au travers de son existence, l’acte divin de la Création en ait été l’objet. La disproportion métaphysique s’ajoute à l’insoutenable de la tragédie vécue.

Dominique Aubier étudie la ressemblance entre l’hébreu et l’allemand au titre de la dialectique cerveau caché / aire somatosensorielle. Elle décape les conceptions de certains linguistes qui mettent le Gange au nombre des fleuves qui sortent d’Eden pour arroser le jardin germanique. Elle retrace l’histoire de l’espièglerie intellectuelle qu’a été — et qu’est toujours — la thèse de l’indo-européen, cet antique et introuvable indo-aryen d’origine inventé de toute pièce. Or, écrit-elle, « le nazisme s’appuiera sur cette thèse, opinion qui a gagné les écoles et les universités. Elle y fait toujours excellente figure, enseignée de nos jours encore comme vérité établie ». Autre mise au point : l’auteur affirme que l’invention de la méthode globale d’apprentissage de la lecture n’est pas sans rapport avec la conviction aryaniste. Sa logique valorise l’unité verbale, le mot, et réfute la notion d’alphabet comme base engrammatique propre au cerveau, fait essentiel de la doctrine biblique. La méthode d’enseignement globale est donc clairement d’essence négationniste au regard de l’alphabet. De quoi faire grincer des dents certains pédagogues ? La négation des lettres au profit de l’incertitude orthographique des syllabes avance une méthode allant à l’encontre de l’évolution phylogénétique de l’espèce humaine dont la cérébration s’effectue autour de la reconnaissance du projet lettrique. L’Education Nationale aura-t-elle le courage de rétablir les priorités ?

9. Voir clair dans l’unité
 
Le dernier chapitre de cet ouvrage magistral conclut sur les travaux du systématicien Gregory Bateson dont l’auteur salue les efforts tendant à trouver, par la voie scientifique, le diamant du sens. Elle rend hommage à ce chercheur et sa fine perception des phénomènes de symétrie. Cependant, ajoute-t-elle, faute d’être rendu à l’unité, ses spéculations se heurtent à l’absence d’une donnée essentielle. C’est bien là tout le problème de notre culture mondiale : le principe d’unité ne lui est pas connu. La science en recherche la formule depuis plus d’un demi-siècle et les philosophies ne souhaitent même plus l’obtenir… Mais il y a la 23e lettre ! C’est elle qui détient le savoir qui permet de voir clair dans les procédures infaillibles de l’unité. C’est en ayant recours à elle que se rétablissent les normes fixes du réel. Signe de royauté structurelle, cette lettre possède la force d’apaisement qui accompagne l’intelligibilité de toute chose.

Cet ouvrage de Dominique Aubier constitue une œuvre de haute vertu civilisatrice. Il est le fruit d’une percutante rencontre. La science est remise à sa juste place, dans le cadre de la procédure efficace, hautement initiatique. L’alphabet hébreu est établi dans son ontologie. Cette confrontation Connaissance et sciences, dans le respect scrupuleux de la priorité initiatique sur la démarche spéculative suscite, dans l’esprit du lecteur, la joie d’un Qorban intérieur : un arc électrique foudroyant tendu entre deux électrodes.

Ce livre offre un apaisement, une réparation universels, des retrouvailles avec soi-même. Une vision de l’histoire nous engageant au progrès, à la sublimation des blessures, à l’élévation de notre être par la conscience.

La 23e lettre de l’Alphabet Hébreu
par Dominique Aubier. 
418 pages. 16,5 x 24 cm. Ed. M.L.L./ La Bouche du Pel. 54 € 


La 23è Lettre de l'Alphabet hébreu est le premier tome du triptyque La Haute kabbale de l'Eternité.
Tome 1. La 23è Lettre de l'Alphabet hébreu.
Tome 2. La Porte de L'Inde.
Tome 3. La Porte de France.

Tous les livres de Dominique Aubier sont disponibles ici :


Les explications données dans ce texte et parues sur ce blog peuvent être reprises mais leur source doit être citée : "car celui qui ne cite pas ses sources empêche le messie de venir" (Pirké de Rabbi Eleazar).

Je remercie les mécènes qui soutiennent ce blog.

MLL - La Bouche du Pel
BP 16
27 240 DAMVILLE


 

2 commentaires:

François-Marie Michaut a dit…

Voici la partie du texte de DB que je veux commenter :

" 9. Voir clair dans l’unité

Le dernier chapitre de cet ouvrage magistral conclut sur les travaux du systématicien Gregory Bateson dont l’auteur salue les efforts tendant à trouver, par la voie scientifique, le diamant du sens. " Fin de citation

Vous faites une erreur, cher auteur. Grégory Bateson, le père de l'Ecole de psychiatrie de Polo Alto (Californie) n'est PAS systématicien ( branche de la zoologie et de la botanique s'occupant des classifications) mais SYSTEMICIEN. Raisonner en termes de système, prise en compte majeure de l'environnement humain, n'est pas une démarche familière aux médecins. Son objectif, formulé dans son livre " Vers une écologie de l'esprit" publié en 1972 est un appel à une nouvelle science, celle de l'esprit. Appel non entendu, ni surtout compris ( une science de la conscience, ça choque ceux qui sont dressés au seul raisonnement causal linéaire) sauf de quelques personnes isolées. La braise de la soif de connaissance de l'essentiel n'est pas éteinte du côté de la science. Juste un peu de vent, et elle ne demande qu'à flamber comme jamais elle n'a pu le faire.
FMM

François-Marie Michaut a dit…

Rectification :
Ce brave Gregory Bateson est le phare de l'École de Palo Alto ( je connais pas la traduction de ce nom de lieu). Donc, ce n'est pas "Polo" que j'aurais du écrire. Paul est étranger à l'affaire de la Silicon Valley, ce haut lieu de l'intelligence nous dit-on...