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mardi 20 décembre 2016

Connaître et maîtriser son "Allié". Une leçon de Dominique Aubier. Partie 2/5

Connaître et maîtriser son Allié (2/5)
Suite de la leçon sur l'Allié, un concept initiatique expliqué par Dominique Aubier. Traduction et transcription de la conversation avec une personnalité politique espagnole, ancien ambassadeur d'Espagne, ministre, sénateur, Président de la Région de Galicia jusqu'en 2010. Entretien enregistrée sur magnétophone à cassettes Telefunken, en 1991 à Carboneras, Andalousie.

 
Dominique Aubier :  — Tenez, je connaissais un jeune homme dont l'allié était la paresse.
Ministre F. I. : — La paresse, pour allié ? Voilà qui est étrange !… 

Mon magnéto tournait, prenant copie de toute la conversation… "Un jour cela sera utile" m'avait dit Dominique Aubier… Enregistré sur cassette 90 mn Agfa. Relevé.


4. Suite de la leçon sur l'Allié
— Mon gaillard était un athlète remarquable, reprit Dominique Aubier : un corps doté d'une musculature superbe ! De plus, il était doué : sans effort, il s'était imposé dans toutes les épreuves régionales d’athlétisme. Les entraîneurs nationaux l'avaient repéré et pensaient en faire un champion olympique de courses. Mais rien à faire, il s’est découragé au bout de quelques semaines. Il a ensuite été sollicité par le football où il excellait. Un surdoué ! Là aussi, il s'était fait remarquer par son talent naturel. Mais de là qu’il accepte de suivre les entraînements ! Chaque fois qu’une opportunité professionnelle pointait à l’horizon, l'Allié se mettait en travers de son chemin. Il sombrait dans la paresse absolue. Je l'ai rencontré quand, prenant de l'âge, il s'est rendu compte qu'il avait gâché des chances fabuleuses. Il m'a confié que la paresse était chez lui pire qu'une drogue : elle lui tombait dessus comme une chape… mais une chape de bonheur, il en devenait amorphe… et heureux de l'être.
 — Comment s’en est-il sorti ?
 — Je l'ai embauché. Je lui ai confié une liste de travaux à exécuter dans la propriété. Pendant deux jours, il a sincèrement essayé de travailler, mais au troisième, je l'ai surpris qui se pelotonnait dans un hamac. Son allié l'avait vaincu, une fois de plus… J'étais prête à le renvoyer. Quand soudain a surgi la couleuvre…
 — Un serpent ? J'imagine qu'il a sursauté !
 — Et comment ! Il y en a de belles, ici ! Dans le désert d'Almeria. Deux mètres de long ! Tandis que notre indolent se prélassait, le reptile s'était glissé dans son hamac. Au réveil, quand il s’est aperçu qu'il dormait avec un serpent, mon jeune ami a bondi de terreur. Le hamac s'est retourné, les jetant tous deux à terre. Le serpent l'a regardé droit dans les yeux… J'ignore ce qu'il lui a dit, mais la panique a été phénoménale. Il s'est mis à crier, en se plaquant contre le mur de la terrasse. J'ai accouru, croyant à un accident. Juana, la gouvernante de la maison, elle, était, totalement indifférente au serpent. Elle a tendu un balais à notre paresseux en lui disant : "Allez, idiot, mets-toi au travail au lieu de pleurnicher, et dégage-moi ce "bitcho". Notre pauvre jeune homme était dans un état de tremblement invraisemblable, électrocuté par la vision du reptile et surtout d'avoir pratiquement dormi avec lui. Cette terreur lui est restée, et depuis ce jour, plus jamais le paresseux ne s'est assoupi. Dès que ses paupières commencent à lui peser, la terreur s'empare de lui… Le spectre du serpent le tient éveillé. Le mot, à lui seul, le terrorise. On ne peut le prononcer en sa présence. D'ailleurs, dans le village, les gens ne le prononcent pas. Ils parlent de reptile, de "bitcho", mais jamais de "serpiente". Eh bien prenez l’exemple de notre énergumène. Ayant vu son allié, il a été terrorisé. Il a lutté, il l'a vaincu. Attention, ce n'est pas le serpent, son Allié, mais la force qui attire le serpent, donc sa paresse voluptueuse… Son destin était d'être un actif, un acteur impliqué… Son Allié tirait à lui toute sa force pour le faire échouer et l'anéantir…


— Et qu'a-t-il fait, Señora ? Cela devrait être extrêmement éprouvant pour lui.
Pendant quelques jours on ne l'a pas revu. Puis il est revenu pour essayer de comprendre. Sa tentative de compréhension était déjà une victoire.
 — Comprendre serait donc un "acte de pouvoir" ?
— Absolument, monsieur le ministre. Comprendre un phénomène, c'est le réduire à son intelligibilité, donc le cerner. Identifier l'Allié, le repérer, comprendre son langage. Le vaincre en ne le laissant pas dominer. Conclusion, il s'est mis au travail. Et dès lors, la paresse, au lieu d'être la ruine de son existence, s'est transformée en indicateur de destin. Il a compris que chaque fois que quelque chose d'important se désigne à lui, l'allié se manifeste. L'invitation à paresser devient pour mon ami le signe positif de redoubler d'attention, de s'impliquer et de retrousser ses manches… Il a dû son réveil à l'aide supérieure du reptile. C'était une grâce. Pour d'autres, il faut mener un combat beaucoup plus difficile. Pour lui, ce fut un changement radical. Et pour vous, M. le Ministre… votre Allié… vous en avez une idée ? Vous avez certainement rencontré quelque démon dans votre vie autour d'une thématique centrale qui serait votre Allié…
— Si j'ai bien compris, vous me demandez de me livrer ? Je crois que je pourrais vous surprendre…

La suite dans un prochain Blog… si cela vous intéresse…
Connaître et maitriser son allié : 3/5 suite
— L'allié d'un homme politique…
— Comment cerner son allié
— Qui est-il ? 

Je remercie les lecteurs qui apportent leur soutien pour ce blog et leur mécénat pour l'œuvre de Dominique Aubier.


mardi 13 décembre 2016

Connaître et maîtriser son allié.

Comment connaître et maîtriser son Allié. (1/5) 

par Dominique Blumenstihl


(selon les notes prises lors d'une leçon de Dominique Aubier enregistrée en Espagne. 1991, en conversation avec le ministre et Sénateur de Galicia.)

Qui n'a pas remarqué que dans sa vie, certains thèmes revenaient sans cesse ? Nous nous interrogeons sur le caractère répétitif de certaines de nos tendances, parfois irrépressibles. Nous commettons les mêmes erreurs, fondées sur les mêmes fascinations… Et nous commettons toujours la même maladresse qui peut, à la longue, devenir un terrible défaut aux yeux des autres, et pour notre propre vie. Au début, cela prend la forme d'une petite anecdote. Puis à force, cela s'inscrit dans la vie et nous mène aux situations désastreuses.
S'agirait-il de manies, d'habitudes, de rituels plus ou moins conscients ? Comme si notre vie retombait chaque fois dans les mêmes plis… quitte parfois à nous enfoncer. Cela survient d'un coup, c'est trop fort, nous ne pouvons pas nous empêcher d'obéir à cette impulsion dont nous savons pourtant qu'elle va nous mener droit dans le mur.
Quel est ce phénomène étrange ? Et comment s'en défaire ?
C'est l'ALLIÉ.
Dominique Aubier a apporté une explication de ce phénomène dans son livre La Face cachée du Cerveau. Traduit en Anglais : The Hidden Face of the Brain.

1. L'Allié est présent tout le temps, actif en permanence.
S'agissant d'un élément actif du destin, il est à la manœuvre inlassablement. Comment le repérer ?
Il existe, dans nos vies, une force, une puissance qui exploite les archétypes à ses propres fins. C'est sur le territoire de ces intrigantes répétitions que s'active ce que l'amérindien Don Juan, de la tribu des Yaquis, appelait l'Allié. C'est Don Juan Matus, au travers des ouvrages de l'ethnologue Carlos Castaneda, qui a fixé cette terminologie, extrêmement judicieuse en ce qu'elle exprime les potentiels dont il recèle. Les traditions du monde en connaissent le principe, sous différentes appellations, mais le mot espagnol Alliado préconisé par l'insaisissable et sympathique sorcier Yaqui semble le plus adéquat.
L'écrivain André Malraux a observé, dans sa vie, la puissance de l'Allié. De son Allié personnel. Il en a même indiqué le nom. L'Allié est en effet une force qui a un nom, qui est dévolu individuellement à l'être. Le célèbre écrivain et ministre de la Culture sous De Gaulle en a vérifié la validité, constatant la permanence, tout au long de son existence, de certains thèmes récurrents, toujours centrés sur cet Allié qui se manifestait chaque fois lorsqu'il se trouvait dans des circonstances périlleuses… ou heureuses.

La notion d'Allié est très bien explicitée dans le livre Quand le Sacré fait du Cinéma où Dominique Aubier montre comment les cinéastes ont remarqué sa présence dans la vie. Ces artistes les ont intégrés dans leurs œuvres et certains films, comme Gilda de Charles Vidor (1946) ou le film chinois Pluie de Lumière sur la Montagne Vide, de King Hu (1978) donnent à voir la puissance des "Alliés", au côté des personnes qui en sont les "titulaires". Ange maudit conduisant à la perte ou au contraire, à la chance, dès lors qu'il est vaincu…« L'Allié est protecteur, c'est une entité qui s'active dans le cinéma de nos propres existences. Pour qu'il soit protecteur, il faut l'avoir vaincu. Et il vaut mieux les repérer pour s'en faire des aides plutôt que subir leur coercition et se retrouver sous leur domination. Parce qu'il est féroce, l'Allié, tant qu'il est indompté. Et que l'on ne s'imagine pas que ce soit chose aisée que l'attraper et le réduire en purée ! Parce qu'il est toujours là, à nous guetter comme un puma prêt à déchiqueter sa proie

2. Un jour, j'ai eu la chance d'assister…
à une leçon de Dominique Aubier portant sur l'Allié.
J'ai enregistré le cours et je l'ai reporté par écrit. Ce n'était pas, à proprement parler, un cours, mais une conversation. Un moment extraordinaire. Cela se passait en Espagne, dans sa maison, à Carboneras (Andalousie). Nous étions au printemps, sur la terrasse. La douceur du climat était délicieuse. J'avais souvent avec moi un magnétophone à cassettes, un vieux "Telefunken" et j'enregistrais les cigales et le bruit de la mer, histoire de faire une provision de chaleur pour l'hiver. Pas mal de conversations ont ainsi été "capturées", avec le consentement des personnes présentes.

Ce jour là, l'interlocuteur de Dominique Aubier était un homme politique venu tout exprès depuis Madrid pour la consulter. Cela se passait en 1991. L'Espagne préparait son entrée dans la Communauté Européenne qui devait intervenir en 92 et de grands bouleversements s'annonçaient auxquels le pays allait faire face, avec une réussite extraordinaire. La révolution était en marche, la "movida", comme on appelait cela.
Cet homme politique, ancien ambassadeur d'Espagne au Royaume Uni, ancien ministre, Président de la région de Galicia, chef d'un des principaux partis politiques, un homme impressionnant aussi bien par sa stature que son autorité, cherchait des solutions pour construire au mieux une politique culturelle et économique cohérente pour son pays. Il n'avait aucune crainte à venir s'instruire auprès de l'experte de Don Quichotte dont il connaissait et suivait depuis longtemps les travaux. Il avait été l'un de ceux qui avaient travaillé à la transition entre l'époque franquiste et la démocratie. Il avait soutenu le jeune roi Juan Carlos lorsqu'il sauva l'Espagne du coup d'Etat militaire. Il est resté sénateur de la province de Galicia, capitale St Jacques de Compostela, jusqu'en 2010…

La notion d'Allié le tourmentait et Dominique Aubier lui répondait, en tout respect de sa fonction, mais sans aucune circonvolution. C'est que le Maître n'avait pas froid aux yeux et ne craignait jamais de dire la vérité… au bon moment, et toujours avec les mots bien choisis — et souvent avec beaucoup d'humour

Le ton de la conversation était amical et franc.
La conversation se déroulait à huis clos. Dominique Aubier m'avait demandé d'y assister comme témoin. Avec l'accord de l'interlocuteur, il avait été convenu qu' « un jour, cette leçon pourrait être divulguée… » J'ai assisté, médusé et sidéré, à cet entretien. Je dois reconnaître qu'à l'époque, je n'y comprenais pas grand chose d'autant que tout se déroulait en espagnol. Les années ont passé. Tout devient plus clair… Je crois que le jour est venu pour divulguer cet échange, dans un esprit de partage avec tous.

3. « L'ALLIÉ… monsieur le Ministre,
commença Dominique Aubier, c'est l'élément que le sort vous désigne en guise de protecteur… Il espionne pour vous toutes les situations et vous en livre le sens. Il sait toujours tout et ne se trompe jamais. Simplement, il faut le dompter. Le maîtriser. Il faut le battre. L'allié est une force et il peut revêtir toutes sortes de formes. Il est lié à votre destin. Il peut se cacher dans un mot, dans une situation, dans le nom d'une personne… il peut être cette personne même. C'est une entité vivante, abstraite, et qui cependant prend forme.
— Une sorte de fantôme ?
— L'allié, vous pouvez le toucher, répondit Dominique Aubier. Il vous parle. Mais avant qu'il devienne votre allié, il est votre ennemi. Ce n'est qu'une fois vaincu qu'il se met à vos ordres. Et croyez-moi, il est rusé.
— Et comment faites - vous pour le vaincre ? Et qu'est-ce que c'est exactement ?
— L'allié, ce que c'est ? C'est ce par quoi s'exprime votre plus mauvais penchant. Aussi longtemps que vous vous adonnez à satisfaire sa soif, il vous domine, et c'est vous qui êtes son esclave. Il vous fait faire des choses, il prend votre énergie, vous donne en prime la satisfaction d'avoir raison, de sorte que vous êtes content de vous. La plupart des gens en sont victimes sans même le savoir. Ils n'ont pas d'allié. Ils n'ont qu'un ennemi. Mais l'initié, lui, il l'identifie, il se retrouve directement confronté à lui. Et surtout, il doit le vaincre. C'est l'épreuve de son initiation. Je vous avertis que l'Allié a plus d'un tour dans son sac pour vous mener par le bout du nez. Il vous fait croire en votre victoire, mais en réalité…
— Et comment faites-vous pour l’identifier ?
— Chacun a le sien… C’est l’endroit de notre penchant personnel le plus détestable. Au début, il vous aveugle, et vous ne pouvez pas le voir. Puis un jour, il vous fait faire quelque chose de pendable. Vous en tirez une grande satisfaction car il vous a prêté sa puissance. Il vous donne le sentiment de la domination sur les autres. Il est un acteur de pouvoir. Et là, attention. C'est là que vous êtes prié de le reconnaître. Il fait tout pour se faire connaître. Mais cela n'est qu'un début. Car son jeu consiste à se faire voir, il veut être connu de vous. C'est là qu'il commence son cirque. Il vous défie. "Ah, tu me connais, dit-il, et tu crois que cela suffit ?" Il dévoile son jeu, il vous met au défi de lui résister. L'allié, qui n'est pas encore votre allié, commence par se gausser de vous… Il vous harcèle et vous fait commettre les pires bévues… Tenez, je connaissais un jeune homme dont l'allié était la paresse.
— La paresse, pour allié ? Voilà qui est étrange !…

Mon magnéto tournait, prenant copie de toute la conversation… "Un jour cela sera utile" m'avait dit Dominique Aubier…
La suite de l'article sur l'allié dans quelques jours.


PS : ce que j'écris sur le blog est gratuit, mais protégé par le droit d'auteurs. A ceux qui reprennent ces explications, merci de citer leur source.

Vous pouvez soutenir ce Blog et l'œuvre de Dominique Aubier.


La suite de cet article : connaître et maîtriser son Allié (2/5)
Connaître et maîtriser son Allié (3/5)

Toute la série : "Connaître et maitriser son Allié"
part. 1
part. 2
part. 3
part. 4
part. 5