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vendredi 8 décembre 2023

Exégèse biblique : "Ils partirent de la montagne de Dieu un chemin de trois jours" (Nombres, X-3)

Exégèse d'un verset biblique :

« Ils partirent de la montagne de Dieu un chemin de trois jours » (Nombres, X-3), par D. Blumenstihl-Roth


Tandis que Don Quichotte fuit sa maison et s'en va sur la route qui le mène au Toboso, la résonance biblique ne laisse de rappeler la thématique du départ, de la sortie. La longue errance du chevalier ne semble pas livrée au hasard. Il a prévu ses étapes, son itinéraire, tout en restant ouvert à ce que l'impromptu lui réserve. Quitter, partir, fuir… mots-clé qui convoquent le verset 3 du chapitre X des Nombres. Il s'est présenté à l'évidence au moment où nos deux compagnons s'engagent sur le chemin de la cité où réside Dulcinée : « Ils partirent de la montagne de Dieu un chemin de trois jours… » Bien sûr, d'autres versets bibliques auraient pu tout aussi bien répondre à l'appel de ces mots, mais qu'y puis-je si c'est ce verset-là qui s'est présenté lorsque j'ai ouvert « au hasard » l'épaisse Torah bilingue qui se trouve en permanence sur ma table de travail ? Serait-ce un effet du « vouloir impénétrable des destins » ?

 Selon les talmudistes qui ont scruté depuis des millénaires jusqu'à la moindre molécule d'encre ayant servi à écrire la Bible, ce verset signifie « que les enfants d'Israël ont fui la montagne du Sinaï comme un enfant qui s'enfuit de l'école, après avoir trop appris… »

 N'est-ce pas la situation du Quichotte qui fuit sa maison, après avoir lu trop de livres ? Il quitte sa bibliothèque, se sépare du monde de l'écrit pour entrer dans le monde de l'action. Sa connaissance, son savoir sont dans sa tête, et sans tarder, il s'en va, ayant tout appris. A-t-il « trop appris » au point qu'un excès de connaissance engendre la folie ?

Le commentaire des talmudistes selon quoi les enfants d'Israël seraient comme des écoliers fuyant l'école après avoir « trop appris » ne nous explique pas en quoi consisterait l'excès provoquant la fuite. De quel trop plein parle-t-il ? Une révélation débordante qui dépasserait le contenant disponible ? Le talmudiste Yosef Rozin complète cet avis (dans Tsafnat Paneah) : « Ils partirent de la montagne de Dieu un chemin de trois jours… "comme un enfant qui s'enfuit de l'école, c'est-à-dire qu'ils n'ont pas voulu apprendre les lettres de la Torah comme des entités séparées, mais ont préféré (lire et étudier) les mots entiers. » Il me semble que R. Rozin a placé la flèche au cœur de la cible. Il met en cause la méthode de lecture, débat qui traverse aujourd'hui encore le monde de l'éducation, singulièrement en France où, depuis des décennies les experts de la pédagogie s'affrontent pour déterminer la meilleure méthode d'apprentissage de la lecture et de l'écriture. Terrain de dispute que l'on retrouve dans le Quichotte où les choses ne sont pas exactement ce qu'elles paraissent et où les mots demandent à être lus tout autrement que selon les règles de la logique linéaire. Le commentaire de Yosef Rozin pourrait s'appliquer à plein lorsqu'éclate la violente dispute entre le Quichotte et le barbier venu récupérer ce qui lui appartient. La querelle porte sur le plat à barbe, elle occupe la fin du chapitre 44 et une grande partie du chapitre 45 volume I.

Lire un mot comme il entend être compris, selon quelle grille de lecture ? 


1. Méthode lettrique ou méthode dite « globale » ? 

Ou une sorte de mixture entre les deux afin de satisfaire tout le monde, sauf l'esprit de l'apprenti ? Faut-il privilégier les lettres, les syllabes où les mots ? On a vu se dégrader l'orthographe des jeunes lorsque la méthode globale fut instituée, on ne sait trop sur quel critère scientifique ni quelle science devant favoriser l'accès au langage. Les dyslexies (fabriquées) ont envahi les écoles primaires, l'esprit des jeunes lecteurs ne parvenant pas à reconnaître l'ordre des lettres composant les syllabes enseignées comme des blocs unitaires, au détriment du sens qui n'est perceptible qu'au travers de l'exacte écriture des lettres dans les mots. Une confusion générale s'est installée, année après année, passant du primaire au secondaire, puis au lycée jusqu'à l'université où l'on voit des générations d'étudiants écrivant une langue quasi phonétique. Appauvrissement de la précision, inquiétante dérivation du sens ou comique confusion d'esprit agrémentant le répertoire des « perles » publiées par les correcteurs d'examens. L'amusement mis à part, on constate que l'intelligibilité du réel s'en trouve amoindrie selon des approximations globalisantes.

Le Talmud a tôt repéré cette erreur qui se produisit… il y a 3000 ans au Sinaï. Beau rappel de l'Histoire. Le peuple a voulu connaître les mots, la narration, mais non les lettres. Il a saisi « en gros » le global le plus vague et incertain, arraché à l'emporte-pièce, et non les composantes exactes de la Révélation. Dominique Aubier commente ce passage : « ils partirent de la montagne un chemin de trois jours ; les 3 jours signalent un cycle à demi parcouru. Le cycle entier aurait voulu que 6 jours se passent, conformément au modèle de la Création que restitue le modèle cortical. Cela signifie qu'ils en étaient à la première instance du cycle ( les 3 premières couches de l'unité, en « phase Bip »), d'une compréhension encore inachevée. Mais qui créa l'illusion, le sentiment d'avoir saisi la totalité. Ils crurent que la leçon était terminée, tandis qu'ils ne venaient que d'en vivre les trois premières occurrences, étagées sur 3 couches, que le Texte dénomme « jour ». L'humanité reçut au Sinaï, et du Sinaï, la fulgurance du don divin de la Parole révélée, qui exigeait une patience plus solide, un temps d'expansion consolidé en deuxième instance afin d'en inscrire la totalité dans le marbre. »


2. Le son du Sinaï

Emmanuel Lévinas parle de la « faillite de la transcendance ». Sans doute a-t-il raison par cette formule taillée sous la lame de son intelligence acérée… qui recouvre surtout l'appréhension du penseur devant un événement auquel il ne remédie pas. Car ce n'est pas la transcendance qui a failli, mais l'esprit de l'homme qui ne sut y accéder ; et plutôt que dresser le constat du désastre il semble plus urgent d'identifier l'erreur et proposer une réparation. Un « tikoun ». Oui, il eut fallu persévérer, entrer en seconde phase d'attention, entrer dans les 3 « jours » suivants, monter vers les couches plus hautes de la structure où le sens des lettres vues s'extériorise des mots entendus et s'affine jusque dans le tracé de leurs glyphes dont l'explication attendait d'être reçue. Mais « ils partirent de la montagne… », cette montagne du sens où le Verbe se donne pour être vu. Encore faut-il que les yeux soient ouvert et que la négation ne vienne obturer les perceptions sensibles. Ce fut le cas, surprenant et pathétique, de Sigmund Freud qui, dans un délire insurrectionnel contre Moïse, affirma que « Le Sinaï n'existe pas ». Faut-il voir en cela un défi de la science lancé à l'encontre de la « montagne de l'épée » ? Le psychanalyste a-t-il scruté, dans l'exemplaire de la Torah que lui avait offert son père à l'occasion de son anniversaire, comment s'écrivait le nom de la montagne qu'il se croyait en mesure de nier ?

סיני

Dans le mot Sinaï se trouvent deux Yod, double énergie qui confirme qu'elle vient à la fois du et par le Sinaï. La valeur numérique du nom est 130. Ce qui écrit le mot composé des lettres Qof Lamed. Qui signifie : léger, agile. Par extension : le son.

קל

Le son du Sinaï s'est laissé entendre, mais demeura partiellement incompris. Les efforts de Moïse n'ont pu pleinement en achever la pleine réception par le peuple. La lecture en demeura incertaine, du moins non menée à son terme, se contentant des phrases aux accents moralistes des commandements, mais ne pénétrant pas l'ontologie des lettres qui en écrivaient le codage. La méthode de lecture adoptée en affaiblit la teneur, autorise interprétations et opinions, détachée qu'elle est du système lettrique de soutènement. L'énergie même du Sinaï — double Yod de son nom — s'en trouve atténuée, la « montagne de l'épée », où l'épée est symbole du verbe, se réduisant dès lors à une colline quelconque couverte de pierres, qu'un absurde pourra nier au gré de ses fascinations personnelles.

Méthode qui continue de sévir. Qui réduit les lettres à n'être que des traces mnémoniques sans qu'il n'existe de système ligateur qui conduise au sens. La méthode globale visualise les mots, la méthode syllabique considère les unités syllabes, elles reposent toutes deux sur la captation synthétique d'une image composée dont les éléments lettriques internes ne sont pas intégrés en tant que porteurs de sens, mais comme des accessoires anecdotiques. Elles fonctionnent sur la mémoire « photographique » et non sur l'acuité sémiologique des composantes lettriques. Cependant, l'esprit humain est ainsi fait qu'il exige du sens. Le lui refuser, au nom de la production visuelle d'une image de mot revient à le priver d'entrer dans l'univers du sens que recèlent les lettres. Lettres essentielles à la structure, à l'organisatoire systémique des mots.


3. L'Alphabet hébraïque : « une rêverie poétique » ? 

Dans sa réflexion sur l'écriture et la parole, Marc-Alain Ouaknin se demande si la lecture des lettres ne serait pas une « rêverie poétique ». Quoi ? La révélation des Lettres du Sinaï ne serait qu'une rêverie ? La question convient peut-être à l'aimable philosophe de l'incertain, toujours en droit de douter, mais venant d'un rabbin formé à une rigoureuse école, elle ne saurait pas même être posée, en ce qu'elle présuppose la négation du Sinaï et donc ce pourquoi des millions furent assassinés. La lecture des lettres serait une rêverie ? Moïse aurait poétiquement rêvé des Lettres ? Toute la Révélation sinaïtique et les millénaires de transmission de la haute leçon révélatoire ne seraient qu'affaire de songe ? Auschwitz, où le meurtre perpétré précisément en négation des Lettres divines, n'aurait été que la mauvaise interprétation d'un rêve ?

Les inconséquences d'un esprit troublé ne sauraient faire école, et je garde cependant fraternellement confiance pour que l'auteur de ces lignes rectifie courageusement ces vagues à l'âme. Je ne doute pas que de belles clarifications verront le jour dans de futurs ouvrages. Aussi je mets cette malheureuse phrase sur le compte de l'extraordinaire difficulté qu'a l'auteur de vivre à la fois dans le dédire philosophique et le dire rabbinique. Concilier les deux ? Pas facile d'être « philorabbin ». Quant à la poétique, en aucun cas le poète ne « rêve » des Lettres mais il en a la vision la plus précise et colorée : Arthur Rimbaud recherche le sens des lettres, dans un langage dont il espère la venue. Ce langage déjà existe. Le rabbin confirme : « Dieu n'a-t-il pas écrit de Sa main, gravé, fixé Sa Parole ? Et ne l'a-t-il pas transmise dans un volume, dans un Livre, dans un système, dans sa totalité ? ». Cependant, le chercheur, à nouveau, se rétracte en ce qu'il n'envisage, dans sa question, que le volume, le Livre, le système, la totalité. Faut-il lui rappeler que le noyau atomique de la Torah réside dans les Lettres qui, une à une, en écrivent le métalangage et qu'il n'existe de Livre que par la puissance des lettres qui le composent ? 

Dieu a certes écrit « dans un Livre », mais il le fit lettre par lettre. Dieu a convoqué ces lettres, une à une, comme l'expose un célèbre passage du Zohar, en commençant par la dernière pour voir laquelle serait la mieux adaptée pour entamer Son Livre. La lettre Beth fut retenue, en ce qu'elle pose la structure pouvant recevoir l'énergie du point qui vint habiter son ventre, première lettre du premier mot « Bérechit », ouvrant le premier verset de Genèse. Dans la Torah, c'est toujours affaire de Lettres, depuis la première à la dernière, et en cela nulle « rêverie poétique » ne saurait emporter l'adhésion du Lecteur souscrivant à l'Alliance, celle-ci étant précisément un contrat passé avec le Verbe. Dans la Torah, les lettres de l'Alphabet construisent le sens. Croire que le mot ou que le volume préside est une inversion — c'est simplement mettre la charrue avant les bœufs.


4. La philosophie du « dédit »

Que signifie alors ce verset ? Que signifie son explication : « ils n'ont pas voulu apprendre les lettres de la Torah comme des entités séparées, mais ont préféré (lire et étudier) les mots entiers » ? M.A. Ouaknin estime, citant son maître « que les enfants d'Israël n'ont pas compris l'autrement qu'être s'énonce dans un dire (qui) doit aussi se dédire pour arracher l'autrement qu'être au dit où l'autrement qu'être se met déjà à ne signifier qu'un être autrement n'a pas été compris. » Et justement, je n'ai pas compris cet « autrement de l'autrement » car en toute modestie de mes capacités intellectuelles dont je mesure l'étroitesse, ce discours m'échappe, mon esprit n'accédant pas à des philogrobulisations de haute altitude. Je ne suis pas loin de rejoindre, du moins pour le cas précis, cette opinion d'un spécialiste de la physique quantique pour qui tout devient intelligible dès lors que l'on admet que « la philosophie constitue l'abus systématique d'une nomenclature inventée précisément en vue de cet abus ». « La lecture des lettres, poursuit le philosophe, signifie l'exigence de la simultanéité du dire et du dédire (ou du moins si la simultanéité est une trop grande exigence, la nécessité d'envisager ce dédire). »

 Je ne crois pas que la Parole de la Torah se dédise jamais de sa promesse, car il en découlerait la vanité de 5000 ans d'histoire, l'inutilité et la vacuité de l'Alliance : serait-elle posée sur un dire susceptible d'être dédit… par l'Eternel ? Faire philosophie du « dédit » signe un esprit incertain qui aligne le dire au même degré que son revers, construisant une équivalence qui réduit l'affirmation du Verbe sinaïtique au degré zéro de la Révélation : elle se dit et se dédit… finissant par s'anéantir. Comment cela ! Dieu se présenterait donc comme Je suis celui qui sera et, simultanément, se dédirait en disant Je ne suis pas… celui qui sera ou qui ne sera jamais ? S'accroche à ce trapèze chancelant tout acrobate qui désire se rompre les os. L'auteur poursuit : « La lecture des lettres exprime "la possibilité d'un arrachement à l'essence" qui va jusqu'à rechercher le non-lieu, car cet arrachement conteste le privilège inconditionnel de la question "où" ». Comment nous accorder à cette pensée tout à l'envers de la fonction même des lettres qui demandent à être lues afin que l'esprit puisse précisément toucher à leur essence, conduisant la conscience vers le Lieu. Rechercher le non-lieu, alors que les Lettres sont l'expression du Lieu ? S'il existe une contestation valable, et nous la disons ici, c'est de vouloir forcer les lettres à exprimer une négation du Lieu alors qu'elles en sont l'émanation.

Comment adhérer à de tels montages intellectuels quand ils portent en eux la négation de la vocation même des Lettres, de la Parole ? Depuis des décennies une certaine mode pseudo-exégétique fondée en approche philo-psychanalytique ligote les Textes dans des impasses où se télescopent oui et non, dire et dédire d'un verbe double, voire bifide, disant à la fois une chose et son contraire, syndrome du « en même temps » qui viendrait conspuer l'Unique dire du Dieu Unique, sans pour autant parvenir, ni même rechercher le sens de l'écriture. Pour ce qui nous concerne, nous en resterons à considérer que YHVH est le nom de ce Dieu locuteur dont la parole est Une et les lettres l'expression même de cette pensée.


5. Faut-il dialoguer avec la négation ?

Génération de penseurs touchés par ce syndrome qu'évoquait Rabbi Rozyn : ils ont quitté l'école trop tôt, et n'ont pas voulu apprendre les lettres de la Torah comme des entités séparées, mais ont préféré (lire et étudier) les mots entiers, ce qui les a amené à tout relativiser, à dédire ce qui a pu être dit, rien n'étant pour eux entièrement gravé dans l'esprit. Ce sont les résidents du « non-lieu » dont parle M.A. Ouaknin, là où le Verbe exilé par le dédire ne peut trouver le site où implanter sa résidence. 

Cette école de philosophie a fait ses émules. Nous les voyons prendre possession des lieux de pouvoir, dans tous les domaines. Esprits pour qui tout est admissible, la chose et son contraire à la fois, et le contraire se justifiant par l'équivoque doctrinale selon laquelle tout serait perpétuellement réversible. Artifices intellectuels d'une pensée errante, faite d'amoncellements cognitifs qui s'annihilent les uns les autres jusqu'à l'asphyxie : et l'on voit surgir, chez les modernes théoriciens d'obscures remises en cause aboutissant à de dramatiques négations issues de ses propres rangs. Que penser de cette néo-école qui prétend que « le messie est fait pour ne pas venir » ? Faut-il discuter ce propos ?

La discussion talmudique, dite « mahloquet » préconise le débat d'idée. Faut-il pour autant accepter le débat avec l'interlocuteur qui sous-entend l'anéantissement de votre espérance ? Les opinions sont toutes respectables et ont toutes droit de citer, le débat talmudique est ouvert, il ne cherche point à convaincre ou persuader. Il autorise l'exposition des divergences dont chacun est prié d'assumer la responsabilité face à la chose dite. Dès lors que penser de ce précepte troublant dont je redoute qu'il fasse des émules : « voir le nom de quatre lettres (YHVH), c'est s'abîmer dans le néant, pénétrer dans une néantisation du savoir, faire l'expérience du vide… », quand tout au contraire le nom de quatre lettres exprime la sortie de l'énergie Yod hors du néant créant ainsi le réel structuré en polarités (Hé) et ouvrant le cycle de la Création ?

 Ce n'est pas faire l'expérience du vide que sonder les quatre lettres divines, c'est au contraire s'emplir de la totalité du Code des lettres promulguant la Création.

Pour étayer sa thèse du « messie-fait-pour-ne-pas-venir », le penseur en appelle curieusement au soutien de Rabbi Nahman de Braslav (1772-1811). Talmudiste solidement ancré dans la tradition, ce dernier écrit fort modestement que ses propres enseignements « ne sont que des introductions », en ce sens qu'il a pleine conscience d'agir en phase préparatoire… à la venue messianique dont il ne doute à aucun moment. Il est auteur en phase « Bip », et c'est une erreur de voir dans son travail préparatoire une attestation de non-venue : bien au contraire, chez lui, aucune tergiversation, aucun dédit ne viennent altérer son œuvre pleinement tournée vers cet avènement. En aucun cas, Rabbi Nahman ne porte soutien au penseur pour qui « le messie permet au temps de se différer continuellement, d'engendrer le temps. Il est de l'ordre du retrait (Tsimtsoum) où l'espace vide n'est pas fait pour être cicatrisé ». Aucun talmudiste, aucun kabbaliste ne se range à ce que le messie serait dans le « différer continuellement ». Déclaration difficilement acceptable, émanant d'un élève de trois jours, qui renvoie le messianisme dans le néant d'un avenir perpétuellement en fuite… tandis que le vieux maître du Talmud sait que le futur tire vers lui le présent, et que la rencontre se fera, entre l'espérance et l'occurrence, car telle est la promesse, telle est l'accomplissement nécessaire qui se dresse au bout du chemin, au bout des 6 jours menant au grand Chabbat et au retour de la Chékhina.

Tous les talmudistes, tous les kabbalistes ont travaillé à l'avènement de l'ère messianique, à la réparation du préjudice infligé par le départ anticipé du Sinaï. Nous les rejoignons afin de participer à la cicatrisation et ne point retarder l'accomplissement promis. La terre promise ne recule pas indéfiniment. Les temps messianiques sont déjà à l'œuvre…