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mercredi 28 octobre 2020

Islam, Connaissance, Laïcité et Raison. L'impossible alliance ?

par Dominique Blumenstihl-Roth

1. Entrer en Résistance…  
Nous devons entrer en résistance et lutter contre l'islam politique, disait récemment un ministre de la République. Entrer en résistance réfère à la Résistance telle qu'elle s'opposa à l'occupation nazie de 1940 à 1945. « Résistance » présuppose, dans cette acception, qu'il y ait « occupation ». Est-ce l'idée sous-entendue ? La France serait-elle dores et déjà « occupée », par un islam politique ?
Qu'est-ce que « l'islam politique » ? Y aurait-il, en face, un islam qui ne le serait pas ? Ces distinctions sont-elles réalistes ? Qu'il soit politique, radical, neutre ou modéré, l'islam s'appuie sur le Coran, un texte dit révélé selon ce qu'en disent les concernés. Le Coran est-il politique, radical ou modéré ? Il est intangible dans sa littéralité. Dans certains pays, il fait office de code juridique — la Charia — et sert de support législatif et juridique, complété par les haddith de la tradition. Dans ces pays, les actes judiciaires et le code social sont conditionnés par l'autorité du Coran. Les juges islamiques y prononcent des sentences selon des critères issus de l'archaïsme religieux, immuable. Cependant, les religions ne sont pas des aboutissements terminaux, elles correspondent à des étapes transitoires propres à un lieu, à une époque, à un moment où le symbolisme était puissant : ces étapes provisoires de la pensée appellent à une libération : une explication universalisante. Qui la produira ? (A moins qu'elle ne soit déjà faite et que nous l'ignorions ?)

2. Notre pays, la France, est laïque. 
Le mot laïcité se traduit en arabe par un mot qui s'écrit
علهن et signifie également séculier. C'est-à-dire : verser dans les valeurs du siècle. Dans l'acception arabe, le mot est loin du sens que nous lui accordons en français. En France, le projet laïque, « pilier » de la République, affirme une valeur positive imprégnant le cadre intellectuel de la pensée afin d'organiser la vie sociale dans le respect et l'acceptation des différences.
La langue arabe est fixée par le Coran. La pensée, même non religieuse, exprimée en cette langue, est traversée par ce référent ontologique qui en innerve tout discours. Que l'on désire énoncer la laïcité en arabe, la langue le fera en des termes conçus et stabilisés par le référent coranique… qui précisément récuse l'alternative. Dès lors peut-on être laïque et musulman sans que cela soit en rupture avec le Coran ?
La langue arabe, conçue et élaborée sur le support coranique qui en fixe la pensée et l'écriture, reçoit le mot « laïcité » en terme d'une sécularisation qui serait, par essence, opposée au sacré. De là un malentendu. En islam, toute approche laïque est perçue comme anti-religieuse. La loi coranique se dresse tout entière contre la laïcité, soutenue dans les pays musulmans par une opinion publique extrêmement conservatrice qui ne facilite pas les efforts d'une élite qui désirerait assouplir les intransigeances de la fixité.
Les évolutions en « terre d'islam » sont lentes, l'inertie de la « Umma » est lourde, communauté de croyants réagissant avec passion et démesure — c'est le propre des foules que s' adonner aux excès surtout quand elles sont manipulées par des communiquants habiles. Quant à l'islam de France, vit-il dans la sérénité d'une paisible certitude de sa place dans la République ? Nous découvrons essentiellement un islam en  France, sous la férule de penseurs et d'imams spécieux formés à l'étranger, dirigeant une communauté mécontente et frustrée, écorchée par les mœurs laïques du territoire. La communauté musulmane française est essentiellement silencieuse, mais comment ne pas sentir vibrer une sourde colère d'insatisfaction qui la traverse et qui peut, à tout moment, se coaguler en passage à l'acte chez tel ou tel individu à la psyché instable ?

Le Président a rappelé… que la liberté d'expression est sanctuarisée en France. Les pays sous autorité musulmane ont immédiatement réagi. Obéissant ou dépassant les autorités officielles, du Liban à la Turquie, Koweit, Qatar, Arabie saoudite, Jordanie, Emirats, Egypte, Algérie, Maroc, Tunisie, des appels médiatiques sur les réseaux sociaux sont lancés pour un boycott des produits fabriqués en France. L'islam — populaire, obéissant et facilement manipulable — se venge sur le terrain économique, une manière de « guerre sainte » touchant au cœur sensible de notre société : l'argent. Ce boycott table sur l'habituel aplatissement de la République devant les enjeux économiques. Le Président turc Erdogan le sait bien, qui se rêve Sultan résurrecteur de l'empire otoman. Cela finira-t-il en une nouvelle bataille de Lépante ? Que faire, en France ? « Entrer en résistance » ? A moins qu'il ne faille organiser… la « Reconquista » de l'espace national qui serait donc… « occupé » ? Je parle de Reconquista en terme de spiritualité.

4. Mais quel est donc le projet de cet islam politique ? 
Tandis que la laïcité envoie la religion et le rapport au sacré dans la sphère privée, l'islam politique voudrait le porter dans la sphère du politique, du législatif et de l'exécutif. L'intégriste écarte donc d'emblée tout ce qui diminuerait sa volonté de puissance. Dans son approche du texte coranique, il préconise l'intransigeance et oblitère les versets d'atténuation. Il rejette la clémence et la miséricorde qui sont pourtant premières selon la loi coranique : « au nom de Dieu clément et miséricordieux » (bismila) est une phrase qui se lit en tête de toutes les sourates (la IX exceptée). Elles sont niées par  l'intégrisme. Sont interdites également l'interprétation symbolique, toute forme d'exégèse, la littéralité s'imposant à l'exclusion de toute élévation libératrice du sens. Cet islam maintient la Communauté musulmane qu'il entend diriger dans un état d'infantilisme et d'ignorance, exploite les ressentis et les affects au mépris de la réflexion profonde. Et proclame la sainteté de son projet tout en s'accordant lui-même la garantie de l'onction divine.

5. La Chahada
Quelle que soit la forme considérée de l'islam, — intégriste, politique, modéré — nous retrouvons toujours le Texte fondateur de la religion. La proclamation de la foi, appelée Chahada affirme : « Il n'y a de dieu que Dieu et Muhammad est son prophète ». Est-il permis de l'étudier sans soulever la colère des croyants ? (Le dialogue est ouvert et j'accepte volontiers d'apprendre et d'être mieux informé.)
Elle se déploie en 3 mouvements : 1) il n'y a… 2) de dieu que Dieu 3) et Muhammad est son prophète. L'enchaînement des trois données se réalise de manière continue, l'une découlant de l'autre dans la logique de l'unitaire.
 
5.1 « Il n'y a… »
On peut s'étonner de ce que la proclamation commence par une négative : « Il n'y a… » En effet, comment une chose peut-elle n'être pas, se demandera l'homme raisonnable, alors qu'à la ligne suivante il est affirmé non seulement qu'elle est, mais de manière unique ? Pourquoi la forme négative ouvre-t-elle une attestation de foi là où il aurait été plus évident, à l'esprit analytique, que l'unicité divine se déclare en terme positif. Pourquoi l'acte d'exposition recourt-il à ce que Dieu n'est pas (il n'y a) pour dire ensuite ce qu'il est (que Dieu) ? Pourquoi ne pas dire directement « Dieu et Dieu seul » ? C'est une question que les théologiens de l'islam se posent.
Le Coran s'ouvrirait-il sur une formule procédant de la négation pour asseoir ensuite l'attestation d'unicité ? A moins que la Chahada n'observe l'archétype de l'Inversion, selon lequel « la gauche structurelle se manifeste en premier ». Le livre La Face cachée du Cerveau, explique que le Qui Fait d'une structure s'active en priorité donnant témoignage d'une information antérieure donnée par le Qui Sait dont il procède. Dans ce sens, l'islam témoigne de sa position de Qui Fait par rapport à un Qui Sait dont il reçoit l'information : le Qui Fait est sujet à l'inversion à l'instant où l'information pénètre dans son espace, d'où l'ouverture première en sa forme négative.

L'initié bien informé de ces procédures systémiques saura que la manifestation extérieure commence par inverser le message initial. La droiture première du Verbe subit l'inversion lors de la pénétration en Qui Fait. Ce phénomène (phénoménologie de l'Esprit !) explique la virulence des appels au meurtre : ce sont des esprits troublés par des « messages » que leur structure mentale défaillante inverse et ne redresse pas. Que le mot amour soit lancé dans l'espace, aussitôt l'inversion suractive en eux le mot de haine. Le « non » s'impose par un effet d'inversion de l'information initiale et englue l'esprit dans sa négativité.
L'initié sait également que l'inversion, dans une structure équilibrée, n'est que momentanée : le redressement de la négative s'opère quasi instantanément au cœur de toute structure saine. Il en est ainsi de la Chahada, elle est construite sur les lois archétypales : la négative de première expression est aussitôt remise à l'endroit par la répétition (archétype du redoublement) de l'affirmation d'unicité. « Dieu que Dieu » redresse la tournure négative d'ouverture en assertion positive réitérée.
On en peut déduire que l'Islam est enclin à percevoir le « message », à l'écouter, d'abord en Qui Fait dont la première réception (par la négative il n'y a) est, en second temps, tournée en polarité positive redoublée. L'Inversion touchant le récipiendaire imposerait son péremptoire négatif si ce dernier n'est pas immédiatement retourné sur la double positivité du nom divin. La Chahada connaît ce processus et l'active car si la négative initiale n'est pas dissoute par la phase « Dieu que Dieu » sa puissance comminatoire peut entraîner de graves dysfonctionnements dans l'esprit qui se trouverait bloqué sur un « il n'y a… ». De là, l'inlassable rappel à la clémence et miséricorde à l'entrée de presque toutes les sourates : ces deux critères d'éthique président en tête de toute la pensée coranique.
Mais alors d'où vient cette violence inouïe des fatwas et autres jugements ordonnés par les juristes de la Charia ? Que font-il du concept de la Miséricorde (Dieu que Dieu), venue en correctif de l'intransigeance ? Et que vaut le littéralisme des obédiences salafistes ou wahhabites si elles oublient justement le sens de la clémence et de la miséricorde ?
Ce sont là des crispations sur le premier niveau d'organisation (sens littéral et mal compris) produisant des esprits ne fonctionnant que sur une parcelle du Code dont ils usent et dont ils empêchent l'évolution vers son plein entendement. Ils ne percent pas les symboles et ignorent la dialectique du signifiant et du signifié à l'intérieur d'une unité garante du sens.
 
L'islam « politique » cultive ce « il n'y a » négateur, qu'il bloque sur lui-même, et qu'il tente d'imposer au monde, au mépris de la miséricorde divine qui n'a nul besoin que des énergumènes s'autodéclarent défenseurs violents de sa cause. Le Dieu unique de la Chahada n'a aucun désir que l'on tue en son nom. Quant à la haine, puissant moteur de l'action, elle est une inversion de l'amour : elle procède de la négation du sentiment prioritaire qui devrait emporter l'adhésion des cœurs. L'islam politique inspirant les actes de terrorisme procède d'une erreur intellectuelle, d'une imposture en ce qu'il érige la négation de la vie comme un prétendu acte de justice. Cet islam-là, engagé dans l'intransigeance d'une négative, s'enfonce dans la schizophrénie à laquelle doit être appliquée une puissante thérapie : c'est l'islam lui-même, s'il en est capable, d'administrer à la faction intégriste la médication salvatrice. Elle consiste à réaliser une exégèse complète du texte coranique, à en libérer les symboles évoqués. J'ignore si les intellectuels musulmans sont à même de produire cet immense effort. En effet, (et Benoît XVI, le théologien Joseph Ratzinger, l'avait noté), l'islam ne « fonctionne pas sur la raison » et l'on aurait grand tort d'exiger qu'il produise une forme de rationalisme explicatif linéaire à l'occidentale. L'islam, et Averroes l'avait relevé, se construit sur la foi, le dogme, le culte et accessoirement la pression de la Communauté. La raison n'intervient que comme ligateur de ces constituants mais non comme un instrument de critique tel que le conçoit la pensée dite des Lumières. Dès lors je crois que l'exégèse du Coran ne peut venir que de l'extérieur de son fief, réalisée en territoire laïque hors de tout expéditif passionnel. « L'apport des preuves » ne peut s'opérer que par une connaissance surplombant les symbolismes, les ramenant au sens ontologique de leur motif premier qui produira alors ce que le Coran appelle « Lumière sur Lumière ». Dans ce domaine, dépassant les intuitions de René Guénon, toute recherche sérieuse commencera par intégrer les découvertes exposées dans la Face cachée du Cerveau, ouvrage-clé unissant le savoir objectif aux données issues du sacré et donnant à voir le code des archétypes universaux à la base des traditions du monde.
 
5.2 « de Dieu que Dieu… »
La seconde partie de la Chahada présente le complément positivant de la première : Dieu que Dieu. Réaffirmation redoublée du divin abolissant toute inversion, anéantissant toute prétention qui placerait avant Dieu une antériorité quelconque. Tout découle donc de lui, dans la mesure où il est seul à pouvoir dire « il y a ». Ce Dieu unique ne peut que désavouer les bourreaux qui prétendent tuer en son nom. Qu'aurait-il besoin d'eux ? Ce Dieu est, avant même que toute affirmation n'atteste son existence. Il est avant que le Coran n'en témoigne, avant son prophète qui n'apparaît qu'en troisième position dans la déclamation. Ce Dieu d'absolu a-t-il besoin qu'une politique humaine impose sa volonté au monde ? N'est-il pas avant tout un Dieu de liberté nous laissant face à nos responsabilités ? Ce Dieu est-il satisfait ou dépité des comportements de ses créatures ? Qu'irait-il éprouver des sentiments, lui qui n'est que perfection — non moins créateur d'une humanité hautement… perfectible ? Perfectible par quel moyen ? Par la loi religieuse ? Par la loi séculière ? Par la morale ? Par l'éthique ? Par les Commandements — « les Dix paroles » de la Torah, à la base de nos codes, et qui nous protègent, a minima, de la barbarie ? Barbarie insolite que celle de l'intégrisme qui s'exerce sous prétexte de parfaire les âmes. L'islam politique rêve-t-il de parfaire l'humanité selon une modélisation de soumission ? La perfection n'est pas de ce monde, elle est réservée à « Celui qui est, celui qui sera » dont Moïse entendit la voix au cœur du Buisson Ardent. Dès lors, qui sont-ils pour prétendre corriger le monde, soumettre autrui aux règles qu'ils estiment les meilleures parce que ce sont les leurs ?
 
5.3 « Et Muhammad est son prophète… »
Troisième admonestation adressée au lecteur du Coran. Oserais-je la passer — respectueusement — sous microscope ? « Son prophète », cela signifie-t-il, après l'affirmation de l'unicité divine, qu'il n'y a qu'un seul prophète parlant en son nom ? « Son » prophète signe en effet un caractère d'unicité. Un seul Dieu, soit. Mais également un seul prophète ? Pourquoi n'est-il pas écrit : « un de ses prophètes » ?
Sommes-nous des ergoteurs quand nous cherchons à comprendre le sens des mots ? Le lecteur du Coran ne se pose pas nécessairement cette question, mais il n'est pas dispensé d'y réfléchir : qui est le narrateur de la Chahada ? Qui est le locuteur qui s'exprime dans ces lignes ? Est-ce Dieu lui-même ? Dans ce cas, pourquoi Dieu parlerait-il de lui-même à la troisième personne ? Pourquoi Dieu ne dit-il pas : Je suis seul Dieu ? Pourquoi cette absence du Moi, du Je divin dans la Chahada ?
Souvenons-nous du verset biblique d'Exode 3-14, « Ehie Acher Ehie », traduit par « Je suis celui qui sera ». Le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob ne craint pas de déclarer son Moi, conjugué au présent, au futur et se projetant dans le temps. Tout au long de la Torah, il ne laisse de dire Je.
אהיה אֹשר אהיה  
Le Dieu du Buisson ardent énonce son être en style direct, en réponse claire au questionnement de Moïse. La Chahada, quant à elle, expose un triplet proclamé par… Par qui ? Qui s'exprime là en disant « Muhammad est son prophète » ? Cela semble prononcé par un tiers narrateur qui n'est Muhammad ni Dieu. Qui tient ce discours, conçu de sorte qu'il soit repris par le lecteur à son tour ? Ce lecteur, croyant ou non, à la lecture de la Chahada, prononce ces paroles dont il devient lui-même le porte-voix. Discours politique donc, d'un narrateur inconnu qui met sur les lèvres du lecteur ce qu'il voudrait entendre prononcé ?
Tout lecteur du Coran endosse de fait les trois assertions de la Chahada. Le lecteur s'impose lui-même l'accompli de la pensée exprimée. La Chahada est en ce sens un acte politique majeur.

6. Quel est le poids de la laïcité…
…en face de cette puissante assertion, prononcée par des millions de musulmans dans le monde, y compris sur le territoire laïque de la République ?
Le mot arabe
علهن s'écrit par les lettres Ayin, Lamed, Mem, Noun. Nous reportant sur la symbolique de l'Alphabet hébreu que la tradition soufie a calquée et reprise, cela signifie : voir (Ayin) / ce qu'enseigne (Lamed) / le cycle dans son moment provisoire (Mem) / à l'humanité (Noun). Autrement dit : la laïcité consiste à voir les choses dans le cycle en cours, au travers de l'œil humain seul. Le mot arabe pour laïcité décrit une pensée où Ayin (la vue sur les choses) préside à l'enseignement du cycle dont l'humanité s'informe en conclusion. Le regard (première lettre) conditionne le résultat terminal humain (Noun), donc à l'exclusion de la participation du sacré (sinon le mot s'écrirait avec un Aleph ou un Yod).
La langue arabe considère que la laïcité est le résultat d'une vue (ayin) au travers d'un prisme incomplet (Mem) qui conditionne l'humain. Et laisse entendre l'absence du sacré. Le mot arabe exprimant l'idée de laïcité transporte l'idée selon laquelle il s'agirait d'une forme de négation du religieux, alors qu'en français, et dans l'esprit débonnaire de la République, ce mot n'exprime pas l'ostracisme contre le sacré, mais propose au contraire l'organisation de l'espace social et culturel permettant à tous de vivre sa foi, son athéisme, sa quête, sa philosophie — et même la sottise — en toute liberté, dans le respect de la loi séculière.
 
7. L'avancée exégétique.
La laïcité, dans la neutralité de l'espace qu'elle propose, en appelle au regard éclairé sur le réel, doté de la « double vue » alliant les sciences à la Connaissance initiatique, sans exclusive. C'est la laïcité qui favorisera l'avancée exégétique des textes sacrés, en ce qu'elle ouvre l'espace mental à la diversité. La recherche du principe d'unité fédérant les rites et croyances du monde, en appui sur les preuves scientifiques, n'est possible que sur le territoire de la laïcité. C'est pourquoi la France, dont c'est la mission universalisante, doit rester le sanctuaire de la pensée laïque et ne se soumettre à aucun particularisme singularisant telle ou telle adhésion à quelque idéologie que ce soit. Ne se soumettre à aucun culte, aucun dogme, aucune mode. J'y inclus le scientisme qui exerce son pouvoir non moins sectaire et la fascination idolâtrique qui nous prosterne devant la technologie forcenée — elle a ses prêtres, ses temples, et ce sont des formes nouvelles… de croyances qui méritent, elles aussi, d'être passées au crible de la critique.
Le territoire de la liberté laïque nous donne la possibilité d'être libres et de nous affranchir de toute forme d'asservissement. Une liberté qui exige un effort d'intelligence, de lucidité. Elle permet l'évolution vers la maturité d'une humanité consciente de sa vocation, au sein d'un univers sans doute lui-même issu d'une conscience… désirant être comprise.
 
Livres :
 
Suite de cette article : l'islam face à la science.

mardi 20 octobre 2020

Comment lutter contre la haine et les terroristes ?

par Dominique Blumenstihl-Roth

Nous sommes consternés par la violence de l'intégrisme musulman. Comment faire pour mettre fin à ce processus  morbide ?

— Il faudrait pratiquement les attraper un à un, leur faire un lavage du cerveau, me disait un ami. Car chacun de ces intégristes est, à titre individuel, porteur du projet d'anéantissement. Mais que pourrions-nous leur inculquer en lieu et place de leur idéologie ? Quelle doctrine, meilleure que la leur, pourrions-nous leur enseigner, qui les passionne avec la même ardeur ? Comment remplacer leur pulsion de mort par celle de la vie ?

Que faisons-nous, en face, de manière évidemment pacifique, qui serait à même de corriger leur état d'esprit ? J'ignore si nous pouvons les changer. Mais nous pouvons nous changer nous-mêmes. Comment ? En cessant d'être ignorants. En acceptant de nous regarder nous-mêmes de manière sérieuse et impitoyable. Voir quelles sont nos qualités, mais aussi tous nos défauts et les affronter. Sortir de notre état de béatitude navrante et chercher à comprendre qui ils sont… et qui nous sommes.

Les intégristes, comme le nom l'indique, ont l'esprit attaché aux ritualisations désuètes, aux méthodes violentes.
Alors regardons les religions : elles sont toutes immobilisées dans des symbolismes de décoration, d'architecture, de peinture, de langage, de vêtements mais les données essentielles ne communiquent plus. Les religions n'ont pas franchi le pas qui sépare l'appréhension symbolique de la maîtrise explicative consciente. C'est dans ce contexte que l'on doit regarder l'Islam, ses réactions, ses blocages, et l'intégrisme qui émane de lui. L'intégrisme, pour tenter de revivifier une dernière fois sa vague, replonge dans le passé des fondateurs pour y puiser l'énergie des premières heures conquérantes. Ce phénomène s'appelle "le retour à l'archigène". Ils n'ont, pour survivre, d'autre recours que s'enfoncer dans la croyance fanatique, à des formes d'expression dont le sens leur échappe.
L'intégrisme correspond à ce que Dominique Aubier a identifié dans son livre "La Face cachée du Cerveau", au retour en force des strates anciennes, activées par des liaisons correspondant à des axones remontant aux couches premières. L'intégrisme est une émanation régressive, mais parfaitement prévisible dans le cadre d'une évolution cyclique à l'intérieur de laquelle le retour à l'archigène est structurellement inscrit.

Si nos experts de la politique avaient un peu plus de culture — ou s'ils acceptaient de s'instruire ou du moins écouter —, ils auraient pu anticiper la vague intégriste. Celle-ci est puissante, parce que le "retour à l'archigène" en tout cycle se myélinise sur un axone qui replonge dans les strates premières du cycle en suivant itinéraire fortement innervé. L'Islam cherche à se ressourcer à son origine, faute d'apercevoir l'issue exégétique de ses textes fondateurs.
Défaillance de l'élite musulmane et incapacité totale de ses intellectuels de réaliser cette exégèse libératrice du langage symbolique du Coran… 
L'intégrisme salafiste est une volonté de renouer avec les formes "intégrales" des premières années de l'Hégire… mais il est bien incapable de produire la moindre lecture initiatique de son Texte. Il ne connaît que la lecture littérale et interdit fermement l'approche symbolique. Quant à "l'Islam de France", il est dirigé par des dévots en charge du culte, mais aucunement d'initiés capable de dégager le sens.

Face à la forme régressive qu'emprunte la religion musulmane, il faut constater qu'il n'existe, à l'intérieur de la même religion, aucune poussée verticale exégétique qui sortirait le texte de référence coranique de son ornière symboliste. Le soufisme est resté bloqué dans les allégories, et les penseurs qui auraient pu susciter l'avancée intellectuelle de l'Islam ont été assassinés dans des conditions horribles. Le supplice du grand poète Mansûr Al Hallaj, tué en raison de ses remarquables perceptions, est emblématique.
L'avancée maximale de l'Islam demeure, encore aujourd'hui, Ibn' Arabî, l'initié andalou… mais son langage métaphorique (du XII° siècle !) reste quasi inaccessible à l'entendement du XXI° siècle. L'Islam n'a produit aucune actualisation de sa propre théologie. (Selon la tradition musulmane, ce serait le rôle de "l'Imam cachée" que la produire. Le chercheur Henry Corbin l'a mentionné dans plusieurs de ses ouvrages.)

Dans sa forme symboliste et littérale, l'Islam se heurte au mur du Temps qui construit une barrière infranchissable aux acceptions archaïques. L'intégrisme est donc sans avenir, car dans un cycle, la liaison vers les couches ancestrales ne dure qu'un temps délimité. Combien de temps va durer cette régression ? Il est démontré que, dans un cycle, quel qu'il soit, des lignes de persistance maintiennent en vie des états de conscience surannés. Tout dépend si, à son opposé, se propose la sortie exégétique drainant l'énergie vers le futur et si cette sortie est soutenue par suffisamment de personnes.
Où est-elle, cette sortie exégétique ? Et qui la réalisera ?

Face aux religions, le rationalisme — notre mode de pensée privilégié — est bien incapable de libérer ces compréhensions anciennes de leur carapace symboliste. L'anthropologie a échoué et l'ethnologie n'a pas réussi à réaliser la synthèse des croyances. Echec sur toute la ligne.
Dès lors se pose la question : nous, en face, dans nos pays occidentaux dits "raisonnables", avons-nous réellement fait le nécessaire pour que notre civilisation produise une grande avancée culturelle aidant la pensée symboliste à se libérer de la gangue des images et textes allégoriques ?

Nous sommes face à un terrorisme de "post-modernité" disait récemment une intellectuelle à la télé. Elle avait raison. Dès lors il faut trouver une réponse du même type. "Notre réponse sera impitoyable", ajoutait un interlocuteur… "notre amour sera impitoyable."
Réponse sublime.
Car si l'amour doit répondre à l'intégrisme terroriste, dans ce cas, qu'est-ce que cet "amour impitoyable" ? L'arme absolue ? On a galvaudé trop souvent le sens du mot "amour" par des acception pathétiques de sentimentalité, alors que dans le langage initiatique c'est un acte symbolique positif : sous ce terme, s'exprime la doctrine de l'Union, de la Synthèse, l'Union des Contraires, que la Tradition hébraïque appelle le grand Qorban. Unir Connaissance et sciences, réaliser la conciliation des contraires dont il doit émerger… une lumière nouvelle.

En France, nous avons les bistrots, la chanson, la philosophie… "Tous au bistrots", disait un responsable culturel, après l'attaque du Bataclan, espérant produire par là un acte de "résistance". Il aurait dû préciser quelle devrait être la boisson universellement servie à table. Le vin de Don Quichotte ? Le vin d'une mise au clair universalisante donnant une vue globale sur les religions et la diversité des cultures ?
 "L'Amour nous sauvera". L'Amour… certes. Le mot ne remplace pas la chose et la chose ne donne pas son explication. Avons-nous produit l'acte d'amour civilisateur :  la grande synthèse des cultures ? Nous parlons de "diversité culturelle", au point que c'est devenu un poncif mais on fait tout le nécessaire pour qu'elle n'émerge jamais. A ce jour, l'Unesco dont ce serait pourtant la mission de soutenir un tel projet, est restée inopérante.
Diversité, oui. Mais entre claironner une thématique sous des termes sentimentaux et en produire la charte, il en va d'une sacrée différence. Alors, qu'en est-il de produire la synthèse universalisante (acte d'amour !) qui dégagerait le cœur conceptuel de toutes les croyances et religions et les unifierait sous la bannière d'une compréhension unitaire ?


Le meilleur moyen de lutter contre l'intégrisme, du point de vue culturel, c'est de promouvoir l'émergence de la grande synthèse. Je ne dis pas : dialogue inter-religieux. Car le dialogue interreligieux est une illusion, chaque religion restant sur sa posture, persuadée qu'elle est la meilleure. Ce qui importe, c'est l'identification du motif à la base de toutes les traditions du monde. Le temps de l'universalité est là, unificatrice.

Ce travail de synthèse a été fait.
Sous la forme d'une lumineuse mise au point qui jette les bases de la civilisation de l'Universel, rendant justice à toutes les formes de tradition, y compris la Science et donc… la raison.
Et cela se trouve dans ce livre :

En français

En anglais

Pour rebâtir le monde, affirmer les valeurs de l'Esprit.

dimanche 18 octobre 2020

Comment concilier la diversité des religions : Le Principe d'Unité et d'Universalité.

Comment concilier la diversité des religions ?

Par Dominique Blumenstihl-Roth

 

La cruelle actualité du terrorisme nous met face à une grave question : comment concilier religions et traditions, tout en respectant leurs particularités ? 

Comment fédérer les cultures, sous quelle bannière accepteraient-elles de s'unir tout en sauvegardant leur identité ? N'est-ce pas la mission même de la laïcité que travailler à cette conciliation surplombant les différences ?

Les poètes ont pressenti la nécessité de ce projet universalisant. Goethe, Whitman, Paul Valéry, Stéphane Mallarmé désiraient toucher l'énigme de cristal. Teilhard de Chardin en a eu l'intuition. Mais quelle philosophie, quelle science, quelle politique donneraient aujourd'hui corps à ces perceptions ?

 

D'éminents chercheurs soupçonnent l'existence d'un motif unique régissant le réel. Mais le corps éparpillé des disciplines scientifiques, malgré ses efforts d'interdisciplinarité, a-t-il identifié la constante universelle ? De leur côté, mythologies et religions, depuis longtemps affirment la cohérence qui unit les camps du Sacré. Mais comment repérer le vecteur universel, fondateur d'unité ? C'est cette enquête-là que présente La Face cachée du Cerveau. Quarante ans de travail ont été nécessaires à cette investigation. Il en résulte un ouvrage magistral qui met au jour le code cortical, révélant la puissance qu'il a d'être le code des archétypes du réel.

 

DOMINIQUE AUBIER part de DON QUICHOTTE, traité initiatique dont elle décode le cryptage et dont elle relève la structure. C'est dans ce livre qu'elle trouve la clé d'universalité, telle que Cervantès l'y avait glissée après l'avoir lui-même reçu de la tradition hébraïque. Munie de cet instrument, l'auteur libère les visions du soufi andalou IBN'ARABI de l'hermétisme médiéval. Elle rapproche le Livre des Demeures de Sainte THERESE d'AVILA du Traité des Palais (le Zohar) de MOISE DE LEON. Elle offre l'explication systémique de l'enseignement chamanique du sorcier amérindien JUAN MATUS, rendu célèbre sous la plume de CARLOS CASTANEDA. Sans oublier les Inuits, les Dogons ou la tradition bouddhiste du Tch'an et du Zen, l'auteur démontre que c'est sur le modèle d'une structure corticale que s'expliquent rites et traditions. Le lecteur est convié à un voyage aux confins des lois fonctionnelles du cortex humain qui restitue l'image de la structure d'universel : disposant de cet outil, chacun peut éprouver par lui-même la validité de ces découvertes.

 

Ethnologues, sociologues, historiens, thérapeutes ou simples chercheurs de vérité trouveront dans ce livre le principe d'unité, l'identification de la structure sous-jacente du réel, ainsi que ses lois de fonctionnement. Applicable à tout domaine d'investigation, aussi bien les sciences sociales que la gestion de projets, la politique, la biologie, l'ethnologie, il s'agit avant tout d'une mise au clair des lois organiques du vivant dont nous pouvons vérifier l'efficience dans nos vies quotidiennes. Ce livre donne en effet une vision des codes, actes et arrêts promulgués par le réel : confrontée à cette inéluctable puissance, notre liberté consiste à nous en instruire afin d'en maîtriser, dans nos vies, l'ordre et l'agencement. Une fantastique perspective pour développer l'art de vivre en accord avec le Réel.

 

La Face cachée du Cerveau s'appuie sur une documentation scientifique de premier plan, mise en dialogue avec les données de la Connaissance. Il s'en dégage un outil précieux permettant d'appréhender la logique des systèmes, aussi bien dans les structures humaines que les processus évolutifs naturels. Cet ouvrage exceptionnel propose au Lecteur la joie de participer à une enquête remarquablement menée, sertie dans l'exactitude d'une sémantique maîtrisée. Ce livre dégage le code fondateur d'universalité, dans le respect de la diversité.

Il permet de concevoir concrètement la Civilisation de l'Universel.

Je considère cet ouvrage comme l'un des plus importants de notre siècle. Il est en soi une prière et une affirmation claire de l'unité humaine.

Rebâtir le monde avec les valeurs de l'Universalité.

Dominique Blumenstihl-Roth

 

lundi 5 octobre 2020

De l'efficacité de la prière face aux cataclysmes.

par Dominique Blumenstihl-Roth
 
Les désastres s'abattent sur le monde — sur notre pays. Covid 19, inondations, incendies… les cataclysmes se suivent… Et nous regardons les phénomènes comme des événements séparés les uns des autres, comme des fatalités.
En réalité, il existe un principe d'unité auquel tous ces phénomènes sont corrélés.
Seul un acte de conscience, s'adressant à ce principe d'unité peut agir sur le monde.
Comment faire ? Comment s'adresser à ce « Principe » gouvernant le réel ? Par quelle initiative peut-on infléchir le cours de choses ? Si le réel — la Création — est issue d'un Verbe, n'est-ce pas ce Verbe qu'il convient d'interroger ? Est-il possible d'établir un dialogue avec cette puissance ?

En ces temps calamiteux, j'ai entendu et vu beaucoup de gens qui priaient, espérant une intervention divine qui rétablirait l'ordre des choses et nous sortirait des difficultés… Mais qu'est-ce que la prière ? Est-elle efficace ?
Avec la Covid, nous avons cru en la science, avec son cortège de « sachants », les scientifiques, prêtres des temps modernes. Mais voilà que la science est tenue en échec. Un échec que l'on tente d'amoindrir en nous répétant que la recherche… progresse et qu'on « finira par trouver », tandis que l'objet de la quête se dissimule… Tant d'investigations, tant d'intelligences finissant dans une impasse ? Le seul remède pour l'instant, c'est le port du masque et le bon vieux lavage des mains dont on s'étonne qu'on le redécouvre comme une nouveauté révolutionnaire alors qu'il est préconisé dans la Torah depuis 5000 ans.

Un regard du côté de la Connaissance
aurait permis une prise de conscience puissante. Nous aurions vu, dans le Corona, un signe. Puisque tout en ce monde est signe : « signes de surface », écrit le soufi andalou Ibn' Arabî, dans son Voyage vers le maître de la Puissance, pour qui le réel est le territoire où s'exprime la pensée divine. Quelle est la pensée dont le Corona serait la manifestation ? Peut-on remonter à l'information ayant suscité la chose ? Elle est lisible dans le nom : si nous vivons dans un monde créé à partir d'un Verbe, alors ce Verbe ne cesse de dire « sois » et aussitôt la chose « est ». Si la chose suscitée se nomme Corona, c'est que de l'autre côté, ce mot a été prononcé. Alors pourquoi sous la forme d'un virus ? La « Couronne » (Kether) de dimension universelle (pandémie) désire être considérée. Mais l'humanité, fascinée par la pensée dite objective, n'en veut pas. La Couronne prend dès lors la forme correspondant au territoire que nous avons favorisé, celui du « faire ». Le virus est un « super-faire » expansif, contagieux, super-productif… à l'image de notre civilisation axée sur les rapports de force et de violence. Le virus nous renvoie à notre conception du monde. Il est une matérialisation de la pensée dominante de notre civilisation.

La Connaissance nous incite à voir dans cette pandémie le signe appelant à un retour vers ce que le kabbaliste appelle la Couronne, la Séfira Kéther depuis laquelle émane tout l'édifice du vivant. Hélas, comment faire entendre le discours initiatique quand tous les médias (et nos consciences) sont saturés par la pensée linéaire ? La science est partout érigée en divinité, alors qu'elle est incapable de fournir la moindre synthèse de son propre savoir.
Nous avons donc assisté à la dispute interne des sciences entre elles, chamailleries sur fond d'égos et de financements : le professeur Raoult, en grand maître contesté, a capté le regard et l'espoir du peuple tandis que d'autres grands prêtres furieux de n'être pas sous les feux des projecteurs se sont livrés à une bataille rangée en invoquant la sainte méthodologie scientifique. Querelle hyponeuriennes, à l'intérieur du « faire » dont chaque parcelle revendique sa suprématie sur le Tout.

Le Président de la République, entouré de son comité d'experts — tous scientifiques et pas un initié — en a été troublé : autant de regards que de spécialistes, aucune synthèse. Autant de points de vues sur la situation qu'il y a de disciplines. Les sciences portent en effet sur le réel un regard… d'insecte, dont l'œil est construit en hexagones multiples juxtaposés et dont chacun détache un détail infime sans que l'unité de la chose observée soit jamais possible. Cruelle analogie avec les sciences… (lire à ce sujet : la Synthèse des Sciences, par Dominique Aubier).
Combien manque un comité d'initiés (et je ne dis pas de philosophes), formés à la Connaissance, ayant le double-regard sur le monde, alliant Connaissance et sciences ! On aurait vu de loin la perspective de la contamination dès l'instant où le virus s'est déclaré au lieu dit Les Contamines. L'avertissement était clair. De même on aurait corrigé le langage : le virus n'est pas « saisonnier » car il ne connaît pas les « quatre saisons » de Vivaldi. Parler de saison, c'est confondre l'effet saisonnier avec la cause ontologique qu'est le cycle. Nos scientos ne se sont pas aperçu qu'ils se laissaient abuser par leur propre langage, d'où la croyance naïve chez de nombreux spécialistes, que le virus serait sensible à la « belle saison » et qu'il prenait, lui aussi, des vacances. Par contre, il connaît l'archétype du Redoublement.

Un milligramme de Connaissance initiatique aurait suffi pour comprendre que la « deuxième vague » correspond à l'archétype Redoublement. Tous les Lecteurs et Lectrices de La Face cachée du Cerveau (F.C.C.) auront compris que le mécanisme de cet archétype est en action dans la dynamique du virus. La deuxième vague est inévitable.
Le soufi de Murcia du XIIIè siècle évoque ce mécanisme au travers de son langage poétique : « le Caché impose son état de dissimulation sur la première manifestation » (c'est le premier signe). « Puis vient l'autorité du Manifeste… » (c'est la seconde instance active en tout cycle vivant). Car tout est soumis à cette dynamique en double-détente où la première instance informe et la seconde réalise durement la chose en ajoutant de nouveaux éléments de fabrication. (Je précise que le langage métaphorique du soufi ne devient intelligible qu'après la mise au point réalisée dans la F.C.C. qui permet le décodage de ce langage qui, autrement, reste hermétique même aux yeux d'un érudit comme Henry Corbin.)

Dans cette pandémie, comme en toute chose de nos vies, il s'agit, comme le disait René Guénon, « de tout voir dans l'unité de la norme. » De quelle norme parlait-il ? Celle du Code dont il a intuitivement pressenti l'existence dès les années 1960, sans pour autant le mettre au clair… (mais depuis lors, c'est chose faite : F.C.C.)
Le sage chinois Tchouang Tsen ne le dit pas autrement : « Vas donc voir ce qu'il en est du réel quand on regarde ses choses à la lumière du Ciel » : c'est précisément cette hauteur de vue — la connaissance de l'unité de la norme — qui manque au politique.

J'aurais conseillé au Président Macron, si tant est qu'on puisse lui suggérer quelque chose, de regarder le film Le facteur sonne toujours deux fois, de Tay Garnett. Il met en scène le mécanisme du Redoublement. On y voit comment une information émise devient acte, entraînant à son tour l'existence d'une situation formant un cycle… le tout dans un processus édifié sur l'archétype bien connu des kabbalistes sous l'appellation Kafil.  Il procède du dire deux fois, que l'on appelle le Davar Chanoui. Ce film tiré du roman de James Caïn, restitue la leçon initiatique du verset biblique « une fois Dieu a parlé, deux fois j'ai entendu » (Psaume 62/12). Le problème avec nos responsables, c'est qu'ils n'entendent pas même la première fois et qu'on ne peut rien leur dire. Pourtant, depuis des millénaires, l'expérience humaine inspirée et enrichie par l'apport considérable des initiés a engrangé cette Connaissance qu'aujourd'hui on méprise.

La « deuxième vague » virale est plus que prévisible, elle est ontologiquement, mécaniquement vouée à être. Donc nous préparer dès maintenant. Elle va se présenter. On peut passer au travers si, en humains ayant vu avec l'œil de voir, nous adoptons l'attitude préventive. Cette action fondée sur la bonne réception de l'information et la connaissance de la Loi de l'archétype, est une prière active et efficace. A défaut de chloroquine miraculeuse, il existe donc l'acte de conscience responsable que produit l'individu.
J'ai écrit ces lignes en août 2020.

Rien n'empêche de prier Dieu et lui demander d'agir… mais franchement, il nous a avertis, informés. Il nous a pourvu de l'instrument initiatique pour traverser.
Il paraît assez « naïf de croire que Dieu subordonne son secours à la demande formulée par les hommes » (Elie Munk), surtout quand ces derniers ont auparavant nié et rejeté tout l'enseignement que la norme divine leur prodiguait. Comment demander secours au capitaine d'un navire que l'on a saboté ?
A quoi bon encore nos supplications d'irresponsables qui ne veulent entendre ?
Comment, la déesse Sanofi n'a pas exaucé les vœux élyséens? Alors vite nous courrons à la messe, à la mosquée, à la synagogue, au temple et implorons la pitié divine, pratiquons la grande prière universelle à laquelle Dieu devrait répondre… tandis que nous nous accordons le privilège de la paresse intellectuelle, le refus de Connaître, le rejet de la Connaissance.
Dieu nous a donné l'instrument, le Code et la Boussole pour nous diriger dans nos vies. La bonne prière serait donc de se servir de ce Code. Pour cela, un retour de l'Humain sur lui-même est nécessaire. Une refonte de nos critères de pensée. Et c'est bien là, le sens du mot « prière ». 

La prière n'est entendue que si elle est émise dans les normes de l'Absolu et non selon celles de nos égos contrariés. Selon le kabbaliste Gikatila, elle est acte de pensée, un élan de volonté. « La requête doit se faire sur les Séphiroth une à une jusqu'à atteindre ce qui domine, c'est-à-dire Ein Sof. L'orant unit les Séphiroth pour les remplir de la bénédiction d'En-Haut. Il atteint la Source du Désir. » Cette conception de la prière en langage imagé s'appuie sur le sens exact du mot en hébreu.

Le mot hébreu désignant la prière se construit sur le verbe « hithpalel », c'est la forme réflexive du verbe « Palol », juger (cf. Elie Munk, La Voix de la Torah, vol 3, p. 126). Nous en déduisons que Hithpalel (prière) signifie : se juger soi-même. Se juger en face de soi, devant une situation.
En français, prière équivaut à « demande » ou même à « supplication ». Elle a trait à un appel à l'aide. Tel n'est pas le sens du mot hébreu et l'on s'en aperçoit dans l'épopée de la reine Esther : tandis qu'elle organise — au moyen d'un Redoublement — la salvation du peuple, elle demande à toute la communauté de se mettre en prière, c'est-à-dire en position de « hithpalel », de retour sur soi réflexif et de jugement individuel et collectif sur elle-même. Esther n'exprime aucune supplication à Dieu, dont le nom YHVH est d'ailleurs absent dans tout le chapitre (Méguilah). Elle pense et agit uniquement selon la norme de l'unité dont elle connaît les règles sur le bout des doigts. J'ai écrit un livre sur le sujet (Esther, la Délivrance d'Israël). C'est par l'application raisonné et résolue du Code des Archétypes, Code de la Vie, qu'Esther réussit son opération hautement politique sauvant les juifs du génocide qu'avait organisé Haman. La commémoration de l'événement perdure depuis 2600 ans sous la forme des fêtes de Pourim dont le but est précisément de rappeler la validité permanente de ces normes.
Cette épopée fût canonisée pour nous instruire de l'efficacité de la norme et du Code des Lois.
Prier, c'est cela : se tourner vers soi, agir en connaissance de cause en fondant l'action sur la Connaissance de la « grille » initiatique qui nous fut donnée… La grille des actions sûres car fondée sur les lois de la Création.
 
 Références :
Le Code des archétypes du Réel. La grille du Principe d'universalité.
— La Voix de la Torah (Elie Munk)